L’instant T
Auteur, metteur en scène, comédien, Antoine LEMAIRE est un explorateur des profondeurs de l’intime. Il scrute les failles secrètes des individus dans leurs relations pour débusquer les non-dits, révèle la partie enfouie des sentiments et des pensées par touches successives comme lorsque l’on décape une boiserie ancienne et qu’une couche de vernis enlevée en révèle une autre, puis une autre encore donnant de l’épaisseur et un nouvel éclairage à l’histoire, ravivant des pans entiers d’un passé familier.
Après 17 ans de vie commune et une rupture, brusque en apparence, un couple s’offre à nos yeux pour ce qui est supposé être une séance de thérapie, la recherche de l’instant précis ayant provoqué la séparation, en comprendre les causes et peut-être apaiser le passé pour aborder différemment l’avenir. La présence d’un tiers, On le sait, facilite souvent voire provoque les plus inattendus « déballages ». Le spectateur, en confesseur, témoin ou juge improvisé, va de découverte en découverte. La femme et l’homme sur scène ne sont pas les moins étonnés de cette mise à nu d’eux-mêmes, striptease de leurs sentiments les plus secrets.
L’écriture d’Antoine LEMAIRE, comme dans Tenderness, oscille en permanence entre ironie sur le fil du rasoir, dérision au ras du quotidien et intime gravité, épanchement douloureux. Sans être manichéen on peut dire que la première tendance est surtout marquée chez l’homme (Antoine LEMAIRE) accentuée par une présence physique tout d’un bloc massif, un peu gauche, tel un éléphant dans la cuisine, avec un curieux mélange d’ahurissement incrédule, d’inconséquence cynique et de rage volubile. La seconde manière est portée par la femme (Doreen VASSEUR) puisant dans sa fragilité une force insoupçonnée redoutable de précision ; elle se tient là presque timide, blessée, frémissante de secrète douleur ; elle confesse l’amour bafoué comme le vent se murmure entre les interstices des pierres. On finit par ne plus savoir ou l’on est. Le théâtre et la vie réelle se croisent, se mélangent.
L’utilisation de la vidéo avec son lot de témoignages et de fragments du banal quotidien pris sur le vif renforce le propos en y apportant une dimension nouvelle. Quelques élagages ici et là seraient sans doute les bienvenus pour donner à l’ensemble plus d’impact encore.
Vendredi 25 mai à 20H30 à la bourse du travail
- Entré gratuite -
Réservations : service culturel 03.21.02.18.78
